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Samedi 2 juin 2007 - Lee's Unleaded

Nous nous étions donné rendez vous au Lee's Unleaded sur South Chicago avenue au niveau de la 74ème rue, au fin fond du south side pour assister au traditionnel concert de Johnny Drummer. Je précise que le Lee's Unleaded est mon club favori à Chicago en particulier pour son accueil et son ambiance festive. Je n'y ai que des bons souvenirs. Un concert de Johnny Drummer dans ce club (où il est programmé tous les samedi) est toujours un fête, bien plus qu'un simple concert, des moments vraiment magiques, inoubliables presque irracontables, des moments à vivre... Les surprises et les invités se succèdent comme les voitures au péage de St Arnoult un dimanche soir. Le public local aime danser et en particulier, les femmes s'invitent sur scène pour effectuer des chorégraphies impensables en France qui rappellent les danseuses de Bobby Rush. Ici, tout le monde s'amuse et ça ne choque personne.
Bref, nous arrivons au Lee's Unleaded pour le début de concert. Un petit coup d'œil circulaire pour voir si K-Led est là ? non, visiblement, nous sommes les premiers, il n'est pas arrivé... Ca commence un peu à m'inquiéter, va t'il bien venir ?
Mississippi au Bosman Blues Center - 2006 C'est avec un certain soulagement que je le vois débarquer juste pour la pause sur le coup de 22h. Il est lui aussi soulagé de nous y retrouver, car figurez vous qu'il a fait le trajet à pied depuis le Millenium Park où il avait assisté à une partie du festival de gospel. Environ 80 blocs à pied, au moins 30 bornes à vu nez ! Il a traversé tout le ghetto à pied !!! Je n'en reviens pas... J'avais toujours été fasciné par les récits d'André Hobus (publiés par Rolling & Tumbling) qui était lui aussi un spécialiste pour de telles expéditions dans les ghettos, que ce soit à Chicago, à Houston ou ailleurs. J'avais aussi en mémoire, une brève de Jean Luc Vabres dans Soul Bag n°184 (page 184) au sujet du chanteur Mississippi, un habitué du Bossman Blues Center et résident du quartier. Il avait été invité par Scott Dirks à venir chanter au Smoke Daddy dans le North Side et il y été allé à pied au grand étonnement de Scott Dirks et de Jean Luc Vabres.
Eh bien K-led, sur ce coup là, il a battu André Hobus et Mississippi !!! C'est limite inconscient mais cela correspond bien à la personnalité de K-led qui sur scène comme dans la vie de tous les jours ne choisit jamais la facilité, n'hésitant pas à se mettre en danger et c'est vrai que sur scène, cela donne souvent des moments inoubliables. Cette fois, il a eu de la chance, ce que confirment tous les musiciens et habitants du south side Chicago à qui j'ai raconté l'anecdote. Ils sont unanimement d'accord, "He's blessed !!!" ("il est béni", c'est bien une expression américaine) car ce quartier est vraiment très dangereux, les trafics divers y sont monnaie courante et les coups de feu font partie de la bande son.
Puisque c'est la pause, je profite pour aller discuter dehors avec K-Led, sans être gênés par les décibels de l'incontournable musique du Juke Box, mélange de soul et de blues, au niveau sonore toujours élevé. Alors que K-Led me raconte sa "promenade" à travers le ghetto, je lui indique que les clients du club sont des habitués, ils habitent tous le quartier et viennent à pied (ce qui permet de se garer facilement juste devant, c'est pratique). A ce moment, comme pour illustrer mes propos, une femme à la tenue particulièrement sophistiquée arrive (justement à pied). Ayant sans doute remarqué qu'on parlait d'elle, elle entame la conversation avec nous. Intriguée par notre accent qui ne fait pas trop couleur locale, elle nous demande d'où on vient ?
- "de France, de Paris ..."
- "comment ? de Paris ? mais, j'y vais régulièrement ! vous connaissez le Maxwell café et Gérard Vacher ?"
Khaled lui indique qu'il y a joué avec Lola Gulley...
C'est incroyable comme le monde est petit ! Pendant ce temps, ça y est, je fais le rapprochement:
"Vous êtes Holly Maxwell ?"
"Oui..."
Et elle propose immédiatement à K-Led de l'accompagner à la guitare quand elle sera sur scène lors du set à venir. K-led accepte avec grand plaisir. Le temps d'aller chercher la guitare dans le coffre de ma superbe Chevrolet Impala de location garée à deux pas de l'entrée du Lee's Unleaded, nous rentrons de nouveau dans le club. A peine, la porte d'entrée franchie, nous tombons nez à nez avec Tré, un pilier des clubs du south side qui, invité par Johnny Drummer, avait mis le feu en fin de premier set, avec notamment une version torride du "How blue can you get" de BB King. Je lui présente K-Led et lui promet que nous irons le voir au Lloyd's lounge (toujours dans le south side Chicago), là où il joue tous les dimanche. Tré et K-Led auront l'occasion de faire plus ample connaissance.
Arkansa Belly Roller Nous reprenons notre place à la longue table située juste devant la scène et K-Led fait rapidement connaissance avec sa voisine, Brown Sugar, une excellente chanteuse habituée du Lee's Unleaded (elle chantera plus tard dans la soirée) mais dont la réputation n'a malheureusement jamais dépassé les limites du quartier. Johnny Drummer & the Starliters sont maintenant prêts pour attaquer le second set. Comme toujours, les invités se succèdent, d'abord le chanteur Arkansa Belly Roller, puis c'est au tour d'Holly Maxwell d'être appelée. Elle tient parole, invitant K-Led à venir la rejoindre sur scène avec sa guitare. Et elle entame une longue version de "Proud Mary" façon Tina Turner. Toutes les danseuses que contient la salles se mettent immédiatement en action dans une ambiance aussi chaude que festive. C'est du délire !
Si K-Led n'apprécie pas trop ce morceau, on sent qu'il est ravi de pouvoir jouer sur une des scènes les plus réputées de Chicago, accompagnant Holly Maxwell avec Johnny Drummer & the starliters. Il faut avouer que c'est quand même pas mal pour une première soirée ! D'autres invités suivront comme Shorty Mack, Dolores Scott, Brown Sugar, Bobby too tough, etc... et en fin de soirée, Johnny Drummer invite de nouveau K-Led à rejoindre son groupe sur scène pour plusieurs morceaux où son entente avec le guitariste Alvin Short sera excellente. Une longue discussion suivra d'abord dans le club puis sur le trottoir, Alvin Short proposant à K-Led de jouer avec lui en Europe...
Après quelques échanges de business cards, email, cd, nous reprenons la route de l'hôtel, la tête dans les étoiles. Quel formidable soirée.
Bobby too tough
Junkyard Dog D'ailleurs, je vais ajouter une anecdote à ce compte rendu. En milieu de premier set, Junkyard Dog, chanteur unijambiste habitué des lieux et petite vedette locale prend le micro pour chanter quelques titres. Rapidement, ses fans dans le public (surtout les femmes !) lui tendent quelques billets (ça se passe ainsi avec la plupart de invités). Pour lui, ça se complique car il doit composer avec ses béquilles, le micro et les dollars... je me rappelle d'une de ses prestations il y a quelques années dans ce même Lee's Unleaded. Le club était bondé comme toujours le samedi soir, il se frayait un chemin dans la foule, comme les coureurs cyclistes du tour de France dans l'ascension de l'Alpe d'Huez, un peu en aveugle. Il ramassait un maximum de dollars au passage. Puis il a croisé la serveuse qui arrivait dans l'autre sens avec un plateau rempli de verres et de bouteilles. Gêné dans ses mouvements par ses béquilles, avec le micro dans une main et la liasse de dollars dans l'autre, il a bousculé la serveuse suffisamment pour que le plateau et toutes les boissons tombent à terre. Le carnage !!!
Cette fois ci, pas de problème avec les boissons, par contre, une admiratrice quelque peu impulsive (pourtant venue accompagnée !) l'a plaqué sur notre table sous le regard ébahi de mon ami Claude, elle est monté à son tour sur la table, commençant à caresser Junkyard Dog au visage et sous sa chemise pendant que notre chanteur imperturbable (j'allais dire très professionnel...) continuait à chanter comme si ne rien n'était !
Une fois libéré de la groupie entreprenante, voilà Junkyard Dog qui repasse entre notre table et la petite scène du Lee's Unleaded. Mais s'est semble t'il pris les béquilles dans les nombreux cables qui passent sur scène, et voilà qui se prend une bonne gamelle en direct, le genre de trucs que l'on passe à l'émission "Vidéo gag". Et là encore, même à terre, Junkyard Dog toujours imperturbable continuait à chanter !

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Dimanche 3 juin 2007 - Lloyd's lounge

Enseigne du 5105 Après une journée passée à Millénium park à assister au festival de gospel, nous avons décidé d'aller voir Tail Dragger au 5105, un petit club du West Side. Le Chicago Reader nous indique qu'il y joue tous les dimanche. K-Led profite du trajet en voiture pour changer toutes les cordes de sa guitare. Nous arrivons au 5105 North avenue. Il y a peu d'animation devant le club...
Le club est pourtant bien ouvert. Nous rentrons et là, mauvaise surprise: non seulement le club est quasi désert, mais surtout il n'y a pas de Tail Dragger ni même de groupe pour le remplacer. Je questionne le patron de l'endroit qui m'explique que Tail Dragger a annulé.
"Sera t'il là dimanche prochain ?"
"Je ne peux pas vous le garantir, il vaut mieux téléphoner avant…"
Il nous faut donc trouver une solution de remplacement et nous nous mettons rapidement d'accord pour aller voir Tré au Lloyd's lounge, dans le south side, ce que nous avions prévu de faire le dimanche suivant.
Coup de chance, nous trouvons une place pour nous garer à deux pas de l'entrée du club. Il y a du monde sur le trottoir. Rapidement, nous apercevons Tré à la porte, ce qui nous indique que nous arrivons à la pause. Il nous reconnaît de suite et ne semble pas surpris de nous voir.
Tré, pour ceux qui ne le sauraient pas, c'est le fils de LV Banks. C'est un jeune guitariste chanteur qui était venu à la fin des années 90 au Quai du blues/Maxwell Café à Neuilly et d'ailleurs son affiche est restée présente sur le mur dans l'escalier jusqu'à la fermeture de l'établissement en décembre 2006. A cette époque, je l'avais raté si bien que je ne l'ai découvert qu'en 2002, lors d'une soirée mémorable au Checkerboard lounge, le vrai, l'historique, celui qui a malheureusement été rasé. C'était à la base un concert de Vance Kelly et Tré était monté sur scène en tant que spécial guest dans une soirée qui en comprenait beaucoup dont Billy Branch et Phil Guy. Sa performance ce soir là m'avait impressionné ce qui m'a amené à rechercher ses CD (sur JSP et Wolf) qui sans être mauvais, paraissent un peu fade en comparaison avec ses prestations flamboyantes sur scène. J'ai eu l'occasion de le revoir plusieurs fois sur scène à Chicago, principalement au Artis's dans le south side (où il jouait tous les dimanche), mais aussi lors du Chicago Blues Festival 2005 où il accompagnait Scott Bradbury sur la Best Buy Stage. Quand j'ai appris qu'il tournait en France en décembre 2006, j'ai fait le nécessaire pour qu'il vienne jouer en région parisienne, au One Way à Saint Ouen, dans un endroit rustique et chaleureux qui rappelle inévitablement les clubs du south side Chicago. Il y a donné un show spectaculaire qui a ravi l'audience. Voilà pourquoi je commence à bien connaître Tré, à apprécier à la fois l'artiste et l'homme chaleureux et très abordable.
Nous voici donc au Lloyd's lounge. un club qui me fait un peu penser au 7313, le club de Fred Johnson, un club qui ne figure évidemment sur aucun guide même pas le plus pointu, sa programmation n'est pas répertoriée dans le Chicago Reader, autant dire que les clients sont exclusivement des locaux et que notre peau blanche attire les regards. Néanmoins, l'accueil est excellent comme toujours dans les clubs du south side. Celui-ci est tout en longueur avec un grand bar sur la droite, la scène au fond à gauche et un deuxième bar au fond à droite. Il faut dire que les clients ici ne boivent généralement pas du Perrier ou même de la bière. L'ambiance ici est assez proche de celle du Lee's Unleaded, les danseuses en moins. Les gens nous parlent facilement et surtout les invités se succèdent sur scène. Tre et Terry
le fameux PV Justement, Tré invite K-Led à le rejoindre sur scène pour le dernier set. Immédiatement, on sent un mélange de respect et de complicité entre les deux guitaristes, si bien que Tré demande à K-Led de rester jusqu'à la fin, ce qui lui donne l'occasion d'accompagner notamment la très sexy Lady Cat, chanteuse qui a une petite réputation sur Chicago. Tré qui avait posé la guitare pour se consacrer au chant tout en assurant le spectacle, reprend son instrument. Il entame alors un duel de guitares épique avec K-Led qui tiendra en haleine le public de longues minutes. Ils se rendent coup pour coup dans ce duel amical où il est évident que les deux protagonistes prennent un égal plaisir. Pour utiliser une expression chère à Jacques Perin et à Soul Bag, ils ont pris leur pied ! La tension monte progressivement, lentement mais sûrement et Tré commence à sérieusement titiller K-Led jusqu'à amener sa guitare contre son visage pour jouer avec la langue. Le public (moi le premier) se demande comment K-Led va lui répondre ? C'est à ce moment là qu'il place sa guitare derrière sa tête pour jouer la même phrase musicale. Le public du Lloyd's lounge est littéralement médusé ! Ca se voit dans tous les regards. Ils n'en reviennent pas de voir le jeune français tenir tête à la "star" locale. Le duel s'arrête sur cette réplique aussi inattendue que géniale ! Quelle conclusion...
Après le concert, nous discutons avec Tré et ses musiciens, également avec quelques clients curieux de savoir d'où on venait et impressionnés par la performance de K-Led. Il est temps de retourner à la voiture où je découvre un papier collé sur la vitre. A ma grande surprise (mauvaises surprise, inutile de le préciser !), il s'agit d'un PV de stationnement de 90 dollars. Je découvre alors que j'étais garé sur un arrêt de bus. Comme il n'y a pas de marquage au sol ni d'abris-bus comme en France, juste un poteau avec un panneau bleu, compte tenu du fait qu'il faisait déjà noir quand nous sommes arrivés, je ne l'avais pas remarqué. Et puis, ce qui m'énerve un peu, c'est qu'à cette heure tardive, il ne doit plus y avoir de bus...
Ca gâche un peu la soirée, certes mais surtout je suis très surpris d'avoir été verbalisé dans ce quartier en plein ghetto, où la police brille généralement par son absence. Il y a quelque chose qui m'échappe et j'aurai la réponse à mes interrogations la semaine suivante, quand nous reviendrons au Lloyd's lounge. Evidemment, je ne me suis pas garé de nouveau sur l'arrêt de bus, j'ai alors passé le croisement et surprise: dès l'angle du bloc suivant, je découvre un immense commissariat de police, puis un parking rempli de voitures de police. Le mystère est éclairci, ils n'avaient eu qu'à traverser la rue pour me verbaliser, quel manque de chance !
Un bon sujet pour une chanson blues…

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Lundi 4 juin 2007 - Linda's place

Comme toujours à Chicago, ce d'autant plus à l'approche du festival, l'offre en ce qui concerne les concerts de blues est pléthorique et les choix sont cornéliens. Ce lundi, j'ai envie de retourner dans le south side et j'hésite entre Fantastic L-Roy au Linda's Place et Billy Branch au Artis's. Pour compliquer le choix, K-Led a envie d'aller au Legend's pour prendre part au traditionnel bœuf du lundi. Il se verrait bien jouer dans le club de Buddy Guy qui est l'une des ses influences majeures. Pourquoi pas ? J'envisage alors la possibilité d'une soirée en deux voire trois étapes. Nous nous mettons d'accord pour commencer par aller au Linda's place, au 1044 W. 51st Street. Je ne sais pas si ce club n'est ouvert que le lundi mais en tout cas, il n'y a de la musique live que le lundi, toujours L-Roy Perryman plus connu sous le surnom de Fantastic L-Roy, co-propriétaire de l'endroit avec sa femme Linda qui donne son nom au club.
Fantastic L-Roy J'avais eu l'occasion de voir L-Roy Perryman sur la scène Front Porch lors du Chicago blues festival 2005, où sa prestation dans un registre soul/blues m'avait mis l'eau à la bouche, me poussant à aller le revoir dans son environnement, chez lui, au Linda's place, un club qui est complètement en dehors des circuits touristiques et qui jouit d'une excellente réputation.
Avec l'autoroute, nous y sommes rapidement et nous garons juste en face du club. A l'intérieur, nous découvrons une pièce toute en longueur avec un bar imposant sur la gauche et des petites tables sur la droite. Toutes les tables étant occupées, nous commandons une boisson au bar et nous avançons vers le fond où se trouve (comme souvent dans ce genre de clubs) un billard et bizarrement coincée sur la gauche entre le bar et les toilettes: la scène. Tiens, aujourd'hui, nous ne sommes pas les seuls blancs, il y a un blanc qui joue au billard. Il s'avance immédiatement vers nous pour nous accueillir. Il s'agit en fait de Albert Anderson (surnommé "double A"), le guitariste du Bullet Proof Band (le groupe de L-Roy) mais aussi de Claudette Miller alias "Sweet Claudette", une chanteuse qui a une petite réputation dans le south side. Evidemment, il s'intéresse à K-Led dont la guitare est bien en évidence et lui promet qu'il l'invitera à monter sur scène pour boeuffer avec le groupe. Il tiendra parole ! Le concert démarre tranquillement avec le Bullet Proof Band (sans L-Roy) qui nous sert un blues assez jazzy où les différents musiciens chantent à tour rôle. Puis, quelques invités se mêlent au groupe, un saxophoniste que je ne connais pas et K-Led. Non seulement, il se retrouve en lead guitar mais en plus, on lui passe le micro pour chanter un titre, super !
Et c'est L-Roy en personne qui prend la suite au chant, vêtu d'un superbe costume crème, chapeau et chaussures assortis bien sûr ! Sa voix est exceptionnelle, du velour ! Un détail qui a son importance, il dispose d'un micro sans fil, ce qui lui permet de faire le show, de faire le tour de la salle, de s'arrêter devant chaque femme, de passer derrière le bar, de monter sur bar et même de sortir pour chanter dehors ! On sent qu'il est chez lui et il se permet toutes les fantaisies pour le plus grand plaisir d'un public vraisemblablement d'habitués qui doit le connaître par cœur mais qui réagit au quart de tour. C'est essentiellement un chanteur de soul et il privilégie les ballades. Même moi qui ne suis pas un amateur de soul, je dois reconnaître que servi par une telle voix, dans une telle ambiance et avec un bon groupe de blues, je suis sous le charme.
A la pause, L-Roy vient nous voir pour discuter longuement avec nous, les français de passage dans le south side. Il s'intéresse en particulier à K-Led dont le jeu de guitare ne l'a visiblement pas laissé indifférent. Il en profite pour sélectionner ses propres morceaux sur l'incontournable juke-box. Le moins que l'on puisse dire, c'est que L-Roy est un gars vraiment sympathique et accueillant.
Le deuxième set suit plus ou moins le même schéma que le premier avec d'abord le Bullet Proof Band, ensuite des invités puis l'arrivée de L-Roy. Cette fois, nous découvrons parmi les invités un certain Cliff Harris, un autre chanteur de soul à la voix exceptionnelle; décidément, le south side regorge de talent méconnus !
Cliff Harris
Puis, L-Roy nous refait son show, comme au premier set justifiant pleinement son surnom de "Fantastic L-Roy". Et puis, vers la fin du concert, c'est la patronne Linda en personne qui vient nous voir pour nous offrir à manger, si, si ! Elle nous offre une soupe de poulet absolument délicieuse, d'autant plus appréciée que ce soir là, nous avions mangé dans un établissement de restauration rapide assez innommable. A la fin du concert L-Roy et les musiciens viennent nous rejoindre pour une discussion qui se termine sur le trottoir, l'occasion de faire quelques photos devant la façade et de découvrir que certains des musiciens du groupe sont venus jouer en France, notamment au jazz club Lionel Hampton à Paris avec Big James & the Chicago Play boys.
Finalement, nous n'irons ni au Artis's pour voir Billy Branch ni au Legend's pour bœuf mais nous n'avons aucun regret. Nous avons passé une excellente soirée, constatant que l'accueil si réputé de Linda et L-Roy n'était pas qu'une légende mais bien une réalité.

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Mardi 5 juin 2007 - Bill's Blues Bar

Sammy Fender au Bills Blues Bar A Chicago, comme dans beaucoup de grandes villes américaines, de nombreux clubs organisent des jams, de telle manière qu'il est possible de prendre part à une jam quasiment tous les soirs de la semaine. Les musiciens sont nombreux est la formule remporte visiblement un franc succès. La veille nous avions envisagé d'aller à la jam du Legends, le club de Buddy Guy mais finalement, nous avons passé toute la soirée au Linda's Place. Alors, en ce mardi, le début de semaine est traditionnellement un jour assez creux au niveau de la programmation, nous avons décidé de prendre part à une jam, celle du Bill's Blues Bar à Evanston, un club certes moins prestigieux que le Legends mais qui présente de nombreux avantages, celui d'être loin du loop et des circuits touristiques (donc gage d'authenticité) et celui d'avoir une bonne réputation, une programmation majoritairement blues (comprenant régulièrement de grosses têtes d'affiche), des prix bas et un personnel plutôt accueillant. Et puis, le musicien qui anime la jam est une figure locale, le chanteur guitariste Sammy Fender, très rare en Europe, que j'avais vu il y a quelques années en Hollande lors d'une Blues Estafette à Utrecht. C'est une bonne opportunité de le revoir.
Autant le préciser tout de suite, Chicago est une ville qui sait cultiver le paradoxes. Un paradoxe qui m'a toujours frappé à Chicago (comme dans tout l'Illinois), c'est que le port du casque est obligatoire pour les cyclistes, pas pour les motards !
Un autre paradoxe notoire concerne ces fameuses jams. Pour un musicien non Chicagoan débarquant dans la windy city, le meilleur plan pour jouer n'est pas forcément de fréquenter les nombreuses jams sessions de la ville, surtout pour un guitariste ! Généralement, il faut s'inscrire sur une liste, noter nom, prénom, instrument et … son niveau comme c'est le cas au Bill's Blues Bar ! Généralement, il y a déjà 25 guitaristes d'inscrits et quand on est le 26ème et qu'on est complètement inconnu dans le club, on a peu de chance d'être appelé. Bref, K-Led était dans cette situation ce mardi soir. Néanmoins, il fut appelé en toute fin de soirée, et c'est le patron du bar Bill Gilmore qui appelle les musiciens. Il annonce "… et pour la toute première fois au Bill's Blues Bar, … K-Led … Ba' Saaaaammmm !"
K-Led n'a pu jouer que le temps d'un morceau (sans chanter) partageant la scène avec un autre guitariste mais aussi avec Shoji Naito, le bassiste japonais d'Eddie Clearwater, vu peu de temps auparavant en France au méridien et au festival du passage. Fidèle à sa réputation, Shoji Naito fut plus impassible que jamais, ce n'est pas encore ce soir là qu'on l'a vu sourire !
Il faut aussi préciser qu'il y a dans cette jam une sorte d'esprit de compétition et beaucoup de musiciens essayent de tirer la couverture. C'est clairement ce qui s'est passé durant ce titre chanté par l'autre guitariste qui s'est attribué l'essentiel des solos.
Shoji Naito au Bills Blues Bar
Chainsaw DuPont au Bills Blues Bar Lurrie Bell au Bills Blues Bar Bref, K-Led en est sorti un peu frustré, et il y a de quoi. Attendre toute la soirée pour finalement jouer les faire valoir sur un titre au profit d'un gars peu sympathique, il n'y a pas de quoi déborder d'enthousiasme. Bref, au moment du bilan, cette soirée fut sans doute la moins bonne du voyage, mais il ne faut cependant pas occulter quelques bons, voire très bons moments passés, certes par intermittence. Car outre Sammy Fender, cette jam a rassemblé quelques pointures comme Chainsaw DuPont (excellent en live même si ses cd sont très décevants), Eric Davis et surtout Lurrie Bell. Si, si, Lurrie Bell, le fils du regretté Carey Bell en personne. Ca paraît incroyable mais il est venu en toute simplicité participer à la jam et il nous a offert indiscutablement le meilleur moment de la soirée.

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Mercredi 6 juin 2007 - Rosa's lounge

Ce soir, nous avons décidé d'aller voir une "vieille connaissance", Ray "killer" Allison, ex-batteur de Muddy Waters, Buddy Guy, Koko Taylor et James Cotton entre autres. Depuis l'année 2000, il a décidé de repartir à zéro, de monter son propre groupe pour mener une carrière de frontman en tant que chanteur / guitariste et depuis, il ne joue quasiment plus de batterie sauf pour quelques grands événements comme le concert des Hoochie Coochie Boys le lendemain sur la gibson stage lors du Chicago Blues Festival. Hoochie Coochie Boys n'est pas un groupe régulier mais un all star band monté juste pour ce concert comprenant John Primer (guitare et chant), Mojo Buford (harmonica et chant), Calvin "fuzz" Jones (basse), Ray "killer" Allison (batterie), Rick Kreher (guitare), Barrelhouse Chuck (piano) et Larry Williams, l'un des fils de Muddy Waters (chant).
J'avais eu l'occasion de voir Ray "killer" Allison plusieurs fois en tant que chanteur / guitariste, d'abord en 2004 sur la Front Porch stage lors du Chicago blues festival, puis en 2006 lors d'un concert mémorable au Blue Island Pub, au sud de Chicago où il joue tous les mardi et enfin au printemps 2007 au Bay-Car blues festival où il était l'invité (avec sa femme Angela Brooks) de Nico Wayne Toussaint et où il s'est d'abord produit sur la grande scène du festival puis au Zaping lors de la jam nocturne. K-Led et moi même avions alors eu l'occasion de le rencontrer et de l'interviewer. Vous comprenez maintenant sans doute mieux pourquoi je parlais de "vieille connaissance".
Mais refermons la parenthèse pour présenter brièvement le Rosa's, un club où Ray "killer" Allison se produit tous les mercredi. Le Rosa's lounge est un club qui existe depuis 1984 et qui a bonne réputation; il est suffisamment loin du loop pour ne pas être un piège à touristes. Le club est tenu par des immigrants italiens, le batteur Tony Mangiullo et sa mère Mama Rosa, des vrais amoureux de blues. Cependant, l'ambiance à l'intérieur est relativement calme à l'image du quartier, on est loin de l'exubérance des clubs du ghetto. Je me souviens de cette soirée au Blue Island Pub en 2006, où sans doute, ils n'avaient jamais vu de touristes français traîner dans le coin, Ray Allison était venu nous voir avant le concert pour savoir d'où on venait, il avait vu au premier coup d'œil que nous n'étions pas des habitués de l'endroit ni même des résidants du quartiers. Ensuite, durant tout le concert, entre chaque morceau, il ne manquait de signaler qu'il y avait des français au premier rang, idem quand quelqu'un entrait dans le bar. Nous étions un peu l'attraction, la curiosité de la soirée, tout le monde nous regardait, certains venaient nous parler, nous demander comment on avait atterri là ?
Au Rosa's, ça se passe différemment, on peut venir incognito sans susciter la curiosité.
En arrivant devant le Rosa's, nous apercevons Jean Luc Vabres et Marcel Benedit, deux grands spécialistes reconnus de la scène blues de Chicago qui sortent de voiture, c'est plutôt bon signe, ils sont toujours au courant des bons tuyaux et ont comme un sixième sens pour toujours choisir la bonne soirée. Et ce soir, ils ont eu de la chance, ils se sont garés juste devant le club. Peu temps après, nous les retrouvons à l'intérieur, où le concert est déjà commencé; le "killer" joue plus funky que jamais. Il n'y a pas grand monde alors que nous sommes pourtant à la veille du Chicago Blues festival et que les fans de blues venus du monde entier doivent déjà être sur place. Nous en profitons pour nous installer à la table située juste devant la scène. Non seulement, nous sommes idéalement placés pour suivre le concert, mais en plus, Ray ne peut pas nous rater. Il nous reconnaît effectivement et remarque forcément la télécaster que K-Led a emmené avec lui. Nous sommes installés depuis moins d'une demi-heure lorsque Ray Allison propose à K-Led de le rejoindre sur scène. Leur association fut de courte durée, car Ray Allison profite du fait que K-Led soit guitariste / chanteur pour prendre sa pause et aller boire un coup. K-Led se retrouve alors en chanteur leader le temps de deux titres sur la scène du Rosa's accompagné du groupe de Ray "killer" Allison. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé dans sa tête à ce moment là, sans doute que son cœur a dû s'accélérer et ses idées se mélanger un peu, toujours est il qu'il s'est adressé au public ... en français !
Un grand silence s'est installé dans un public médusé en réponse à la question de K-Led: "est ce que vous allez bien ?"
Ce silence l'a vite ramené sur terre, il n'est pas à Paris mais bien à Chicago. Il se rattrape alors tant bien que mal en anglais, s'amusant du fait qu'ils n'ont rien du comprendre et profitant pour ce présenter brièvement. Il démarre dans la foulée rapidement le premier morceau devant un public attentif et rapidement impressionné par le petit français, aussi bien par son chant que son jeu de guitare. Contrairement à la veille, son entente avec le deuxième guitariste est parfaite. K-Led enchaîne avec un "Let the good time roll" mémorable, il est comme sur un nuage, il est en grande forme ce soir et il y met tout son coeur et toute son âme. Quelle implication et quelle intensité ! K-Led passe ensuite le relais pour le chant au deuxième guitariste et reste sur scène pour l'accompagner. Leur complicité ne se dément pas, ils se renvoient la balle avec beaucoup de respect. Ray "killer" Allison, très attentif n'en perd pas une miette et apprécie visiblement. Le boss en personne Tony Mangiullo viendra féliciter chaleureusement K-Led qui en profite pour lui glisser son CD.

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Jeudi 7 juin 2007 - Rosa's lounge (again !)


La suite prochainement...


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