Carnet de route U.S.A., AVRIL 2003 (1/2) | Carnet de route U.S.A., AVRIL 2003 (2/2) |


JOURNAL DE VOYAGE aux U.S.A., AVRIL 2003 (2/2)


Mercredi 23/4
Orange Mound Jazz Messengers
Au Center le menu est au jazz, et au poulet créole. Orange Mound est un quartier de Memphis. Le groupe comprend : sax, Trompette, piano, contrebasse... Et une chanteuse Berneta Miles. Le style est Bop pour les harmonies, mais plus lent, plus soul. Une atmosphère "club élégant" sophistiqué, ils sont tous noirs. La chanteuse est de la même qualité, voix légère, presque caressante.
photo de JC Billaud photo de JC Billaud
Ce soir on s'est fait kidnappé dés l'après-midi (aux US la soirée commence vers 17h) par la famille Welsch de Millington. Plusieurs amis américains sont conviés pour confirmer le bon accueil à ce couple de français. En plus Rauni adore parler de politique... vous voyez le tableau ? Une soirée heureuse dans une maison traditionnelle en bois du Tennessee, construite vers 1800. Chacun se cale dans ses escarpins et cependant ressent les vérités qu'il ne s'était pas encore dites, tant pis pour la politique. Les voitures de nos hôtes nous conduisent et nous reconduisent. Le bon temps roule.

Jeudi 24/4
Beau depuis la Nouvelle Orléans, la météo récupère ce courant glacé de la baie d'Hudson.
Jeffery Evans
Seul en scène, il raconte le pays, les vies des gens simples, les amours en forme country. Chantre, baladin du Tennessee, un peu Blues, Elvis aussi. Guitare brillante, voix claire derrière la barbe poivre et sel. Les nostalgiques des sixties se régaleraient de sa "Red Cadillac with radio on".
En fin d'après-midi, toujours au Center : Blind Mississippi Morris (Chant, guitare, harmonica) un concert accompagné par un blanc, vendeur de guitare à Clarksdale bien sûr, haut lieu des champs de coton. Morris interprète le pur, le vrai blues, celui des amours contrariés, des alcools frelatés... Le soufre, l'enfer ! J'ai aimé "you said you love me darling, call me home sometimes". Un grand du blues, il a plusieurs CD à son actif. Pour clore dignement le séjour, nous nous offrons le restaurant réputé (et canaille) "The Rendez-vous". Suprême ce barbecue ribs, même pour des français.

Vendredi 25/4
Départ en voiture pour Helena, Arkansas
Le site du grand festival de blues "King biscuit". Le biscuit est une petite crêpe épaisse qui fait partie du petit-déjeuner. Vers 1910 une minoterie prend comme image de marque "King biscuit" présenté par un joueur d'harmonica. C'est lui Sonny Williamson, le premier à promouvoir la musique des noirs sur la radio. Cette heure de radio, chaque midi, se poursuit encore de nos jours. Traversé vite, la vilaine zone des casinos rutilants. Voilà le pays plat, tout plat, où le coton était l'unique mais généreuse ressource grâce au limon apporté depuis toujours par le Mississippi. Après le gigantesque pont la petite ville de Helena où chaque octobre se produit le "King Biscuit Blues Festival". Sur Cherry street, la rue principale, le célèbre "Sunshine" Sonny Payne, 50 ans de radio, nous attend dans son show quotidien : "Le jazz en France, le blues ? That's great ! Django, Grappelli, I love the fiddle (violon non classique) ".
Sunshine: 50 ans de radio, une heure chaque jour.

Les grands ponts sur le Mississippi - photo de JC Billaud
La rue principale, presque unique d'ailleurs, ressemble à un décor de cinéma tellement elle est authentique. Elle est emplie aujourd'hui de Harley-Davidson, des centaines pour le rassemblement des fidèles de ces splendides engins. Des artistes décorent artistiquement, ou érotiquement les réservoirs. De nombreux stands : pantalons de cuir à la cow-boy, équipements raffinés... Et le bruit des motos, des sides, et de la sono qui crache ses décibels en vue de leur concert du soir.
Au Blues Museum, un petit-fils d'esclave, qui porte fier ses 60 ans, nous fait la visite. Belle expo avec la cabine d'un steamer du Mississippi, et le meilleur : "Old man river". La voix grave du grand fleuve qui nous explique comment il respire. Ce qu'il pense, pourquoi il vit et inonde, il ne peut faire autrement, "comprenez-moi !" dit-il. Il étend sa mansuétude sur 31 états du pays, qu'il irrigue et dont il transporte les produits du mieux qu'il peut. S'il fait mal, il le regrette.
Un repas Soul dans un Juke-Joint. Le repas Soul se compose de plats épicés du sud, avec des produits de la région : saucisses fumées, haricots rouges, choux. A regrets, nous partons vers Clarksdale. Le centre de gravité du Delta Blues, celui qui a initié le blues partout. Petite ville autour de la gare désaffectée qui est un autre Blues Museum.
Hopson Plantation nous reçoit dans des "shacks", vieilles cabanes en planches, logement des esclaves, puis des journaliers pour la récolte manuelle du Coton. L'intérieur de chaque cabane, où 1 famille (5 ou 6 personnes) vivait, est aménagé en logement confort pour un couple de touristes américains. L'apparence recherchée est le vétuste, bois brut, rideaux élémentaires, si le frigo ressemble à un tank après campagne, il est immense et tourne en silence. "Victor" la voix de son maître est là sous forme du Gramophone authentique. Piano 1920, mais l'Internet haut débit diffuse 24x24 par la télé, un excellent programme de blues, doux. Nous ne connaissons même pas 1 morceau sur 20, quelles richesses ! Si le fauteuil est élimé, il y a chauffage, air conditionné et tutti quanti. Les Américains constituent leur passé, et ils aiment.
Super chikan
Ce soir concert en plein air avec Super chikan. Celui qui imitait le caquètements des poules... pas mal ! Pour finir la soirée, concert à Ground Zero appartenant à l'acteur Morgan Freeman. Son objectif est de créer "un juke joint". C'est ? Un lieu de Blues, sûr, musique par les noirs, pour les noirs, surtout les blancs. On peut y déguster un repas Soul, mais surtout cette forte musique. Enfin l'authenticité de la musique prime sur le confort. Ce soir, le sextet qui invite une bonne chanteuse joue si fort que l'on entend seulement basse et guitare. Tant pis on peut rentrer.

Samedi 26/4
On décide de rester une journée de plus, dans un B&B, centre ville. Cette maison jouit d'un cadre superbe. Nous sommes accueillis par la journaliste du local "Clarksdale Press Register". Cette Rébecca Hood-Adams insiste pour photographier l'entrée de Rauni dans les lieux.
La remarquable librairie, & disquaire "Cat Head" mérite le voyage, et comme ses clients, elle s'intéresse beaucoup au Festival de Samois, et à Django Reinhardt.
La visite du Delta Blues Museum dure 2h30. Il y a tellement de matières que nous nous asseyons par terre pour prendre des notes. Un spare ribs and beans conséquent chez Abe's BBQ nous met d'attaque. Des voisins du restaurant nous guident à Cleveland (Mississippi). D'immenses champs de coton, au loin les levées du fleuve, maisons pauvres, mais coquettes. On rentre à Clarksdale par l'Interstate 1, dans notre superbe maison patricienne restaurée par l'équipementier (uniformes pour l'armée, hum !) installé dans la ville.

Dimanche 27/4
Dernier jour dans le Delta Blues. Royal petit déjeuner. Transfert à Memphis. Atlanta, puis Bâton Rouge.

Lundi 28/4
Une "Blues Week" se déroule en effet du 27 au 30 Avril. Nous connaissons plusieurs familles de musiciens à Baton Rouge, ainsi les Neal. Un autre aspect de la musique US, en Louisiane, est le Zydeco, pas mal R & B, un peu cajun, beaucoup jazz, un tantinet blues. Une journée promise au calme, épicée le midi d'un repas surprennemment bon au "Shoney's" (chaîne franchisée ?). Le soir un repas Palestinien, dans un établissement de la Nicholson road, proche du fleuve. Les riverains emportent leurs repas pour se régaler chez eux, c'est bien supérieur aux hamburgers.
Varsity Theater
Un bon Tourist information Center, nous avait tout dit ! Concerts quotidiens, et cérémonies, Awards : récompenses aux meilleurs musiciens. La salle est un théâtre légèrement en pente, sympathique avec une excellent vue. La soirée commence par une série de films, interview de grands du blues, vie, carrière. Ces séquences sur les Bluesmen phares de la région sont passionnantes, comme le piano blues trop peu connu, la majorité des musiciens sont actuellement disparus. À la manière des cérémonies du cinéma, les récompenses sont remises par Johnny Palazzano, le promoteur. D'abord James Johnson, est félicité puis Rudy Richard, enfin Raful Neal (le père de la tribu Neal).
Raful Neal ouvre le spectacle, avec harmonica, et une authentique voix du blues. Il se révélera aussi comme le meilleur fil conducteur, toujours présent, encore que discret, un Maître des cérémonies, pour un spectacle de 3 heures en non-stop. Une douzaine d'artistes de talent : chant, avec guitare ou harmonica vont défiler tour à tour pour animer le Band du Juke Joint des Neal : Orgue, keyboard, basse, batterie. Voici ceux que j'ai le plus aimé : d'abord les 3 distingués, puis, Mid Jager, Kenny Neal, Slim Harper, Kenneth Cousin. Luther King, lui, nous a fait un incroyable duo de blues avec Raful Neal, une voix à décoiffer les montagnes, à voir absolument.

Raful Neal - photo de JC Billaud les écrevisses - photo de JC Billaud

Puis un petit homme, type comptable, en trois piéces, se présente sans guitare, surprise ! On s'attendait à la présentation des comptes déficitaires de sa société. Comme on en avait en surnombre, on lui remet une guitare. Il la règle à peine, et lance un Blues, au vrai goût salé. Une voix un petit peu plus haute que les noirs qui l'ont précédé, mais un Bluesman franc et pur. Nous sommes sur le c. ! Deacon John est son nom, nous ne t'oublierons pas ! Mais il n'y a pas eu que du bon, Raful Neal, adroitement, a su maitriser les débordements d'une guitare frénétique et rockeuse. Il reprend le fil à l'harmonica sans heurt (quel métier !) avant de clore la grande soirée. Rendez-vous pris pour le lendemain, au "Blues Challenge" & crawfish, waouh !

Mardi 29/4
Buddy Stewart's Rhythm Museum
Visite de Baton Rouge et du Mississippi, avant le Challenge. Il aura lieu dans une salle sonore, bien peu musée. Le but est de désigner le groupe qui parmi les 6 représentera la ville au Blues Contest de Memphis. En premier lieu, la grande partie : le repas Cajun : écrevisses. Très bon à vrai dire, et qui ouvre l'ambiance pendant qu'un duo sur cène meuble le repas. Nous rencontrons quelques Américains, et une soirée où deux sont retenues pour répondre à leurs invitations. Pourvu que nous ayons assez de CD Django-Grappelli en cadeaux ! Le premier groupe monte sur scène, il commence : assez bon, le second idem, le troisième est "Gipsy swing" (bien qu'ils n'aient pas grand-chose de gipsy). Ils produisent une excellente musique avec Hoodoo Jimmy à l'orgue Hammond, et la chanteuse Susan Owens a un magnétisme ne semblant pas frapper les dévoreurs d'écrevisses. Ils jouent habituellement au "Swamps Mama", Bâton Rouge. Le groupe suivant, celui du plus jeune frère Neal, déclenche un niveau sonore abominable ! Nous replions tout le plus vite, nos tympans n'auraient pu accepter un tel déluge de fer et de feu. La salle est en béton sur toutes les faces du cube, vous voyez les réverbérations !
Au pas de la porte nous rencontrons nos nouveaux amis et les musiciens du Gipsy Swing, qui ont fui aussi. Nous sommes contents néanmoins d'avoir passé la soirée dans la société US telle qu'elle est.

Mercredi 30/4
Retour à la N.O par la rive droite : River road plantation. Donaldsonville, agréable, gentille et calme. Musée, vite visité. Déjeuner au charmant Café Lafourche; le bayou Lafourche est un canal qui va du Mississippi à la mer, ce qui pourrait amener bien des désagrément aux riverains, on nous a même signalé que la ville de Morgan City pourrait disparaître par les humeurs du fleuve. Le café est au bord du bayou, pas bien large cependant, ne pas y aller tremper vos petons, l'alligator guette, on l'a vu ! Pour le punir, l'excellente carte comporte des filets d'alligator. Au bord, on a symboliquement enterré les fantômes de Thibodeaux et Larose afin qu'ils cessent d'embêter les vivants, surtout les âmes sensibles !
Menu : huîtres, poissons chat, crevettes. On ne pouvait faire sans visiter la plantation créole de Laura, en ces temps de dur travail la distraction principale était le Quartier Français à la Nouvelle-Orléans. Enfin la Plantation Oak Alley, merveilleuse perspective, où les chênes sont plus âgés que la plantation d'un siècle. Le soir à la NO, sélection des concerts du lendemain pour "Heritage Festival", le grand.

Jeudi 1/5
Le tableau que l'on va vous dresser, c'est ce que l'on a vu et que l'on a aimé. Pendant 4 jours de 11h à 19h, et sur 13 scénes permanentes, cela fait de la matiére ! Outre les scènes type Woodstock, en plein soleil il y a 5 scènes couvertes et quelquefois avec places assises, plus 2 scènes réfrigérées : le paradis.
Rufus Rip Wimberley Quartet
Rufus Rip Wimberley Quartet, Harmonica blues particulièrement lancinante, chargeant en nous une énergie qui ne demande qu'à sortir.
Warner Williams trio
Warner Williams trio, du beau blues. Encore une harmonica très charmante. La légère rythmique est assurée par une espèce de petite castagnette ou claquette.
Jazz
Jazz, à la scène sponsorisée par notre radio préférée : WWWOZ 90.7. Ici, batterie et piano sont derrière une paroi transparente à hauteur de buste, et les sons de tous les instruments sont repris et mixés au même pupitre.
Sharon Martin
Une belle jeune femme noire, une liane, belle voix. Elle joue si bien avec le micro et se fait applaudir lors d'un dialogue inédit avec son batteur. Et un triomphe de jazz, avec des bruits de bouche, des murmures... et la danse.
Irvin Mayfield
Jazz résolument contemporain pour les amateurs du style. Un morceau d'inspiration Brésilienne a rencontré un succès plus large.
Dave Holland quintet
Le nec plus ultra en jazz était aussi présent. Un type de groupe qui fait l'affiche et emplit les festivals dans le monde. L'énigmatique Dave Holland disait ma voisine.
Gospel
La tente du Gospel est emplie et enthousiaste de l'ouverture à la fermeture du jazz Fest. C'est la seule scène où les groupes de 4 à 100 personnes se suivent sans interruption : un challenge pour la sono. Là ou l'on passe 5 quartets, le Gospel passe 10 ensembles. Mais le nombre de choristes et leur enthousiasme mystique procure un notoire excès de décibels.

Devant la plus grande des scènes de plein air : Acura stationnent des dizaines de milliers de fauteuils pliants, chacun en a au moins un à la bretelle. Sur les couvertures pour allongés on passe la journée au soleil. La sono est conçue pour diffuser sur un hémicycle de 500 m de rayon. Passent là les plus grandes pointures R & B du moment, les plus connus aux US. Partout c'est le règne du roi dollar. D'ailleurs il n'est pas prévu que vous sortiez du jazz-Fest durant la journée, sauf sortie définitive; vous pourriez songer à boire ou manger ailleurs, tout est prévu ici. Interdit de rentrer avec autre chose que de l'eau, l'eau minérale est à 1 $. Et, malgré la chaleur, il n'y a pas de robinet public disponible. Mais mettez la main à la poche et c'est réglé. Des files de 40 ou 50 sanitaires portables propres sont à votre disposition. Parmi les autres grandes scènes de plein air, nous préférons Congo square. Musique du monde un peu moins monde qu'en France, mais tout de même. Les spectacles sont généralement forts dans leur contenu et dans leur expression.

Vendredi 2/5
Tremé Brass Band à Economy Hall tent
Pouvoir dés 11 h du matin faire salle comble et pousser la joie au top niveau,c'est très fort. Seuls 2 brass band peuvent faire cela Paulin bros. et Tremé. Il y a les cuivres, 2 trompettes, 2 chanteurs... Mais surtout la maniére et là les amateurs ne se trompent pas. Issu d'un quartier de la NO Tremé est un marching band. Ses célèbres défilés sont toujours suivis de la grande foule. C'est à la fois la tradition, la joie que l'on partage, en même temps le monde d'aujourd'hui. À partir de la moitié du concert, ce matin 50 spectateurs défilent avec ombrelle dans les allées, c'est Second Line. Un enthousiasme général inonde la salle, Tremé est un phénomène social propre à la Nouvelle Orléans.

photo de JC Billaud Cedric de Waco & famille (Texas) - photo de JC Billaud
2 tribunes intérieures réfrigérées sont consacrées aux interviews de musiciens, ils comportent aussi des concerts délicats. Sur scène avec lui, son fils, son petit-fils, et son arrière petit-fils (sur les genoux de son père). Une famille dont le style Zydeco prend une place de plus en plus importante sur les scènes de Jazz. Il y a seulement 10 ans rare sont les blanc qui se seraient risqués comme nous, dans un "Juke Joint" Zydeco.
Interview agréablement mené, il se termine par un concert de la famille Waco, accordéon ( petit et enrubanné). Le jeune dernier (7 ans) est au washboard, il s'agit d'une cuirasse, type centurion romain, en acier inox, sur laquelle il gratte avec 2 cuillères.
Regina Carter
Bien que Deacon John soit à la tente blues, nous optons pour Regina Carter à la tente Jazz WWOZ.
Depuis le festival de Marciac, Regina a beaucoup progressé. Vainqueur d'un concours classique en Italie, elle a eu l'insigne honneur de jouer sur le violon authentique de Paganini, malgré une ségrégation. Elle interprète un morceau de son nouveau CD, édité à la suite de l'aventure Italienne. Le plus remarquable fut le duo avec son batteur cubain, une jeune femme vue encore à Marciac (Gers). Nous avons aussi beaucoup aimé sa séquence classique. Il faudrait qu'elle revienne en France.

Wake up breakfast chez Sadie, notre ancien B & B - photo de JC Billaud

Samedi 3/5
Maison traditionnelle du French Quarter, au coin de la rue, un Band se prépare. Serait-ce ? Oui ! Le Paulin Bros. défile dans la ruelle, comme l' "Olympia Brass band" au début du jazz. L'architecture du band est complète : 8 grands gaillards noirs, et nous sommes priés de les suivre. Ils s'installent près de la fontaine et entament leur répertoire avec de grands éclats de gaieté. On ne peut guère faire plus festif, l'ambiance monte malgré les fruits frais, les muffins, les cafés et chocolats, et toutes gâteries. Les musiciens sont les plus enthousiastes. Aucun des morceaux les plus délicats du répertoire ne fut oublié par les 3 chanteurs. Les 40 chanceux que nous sommes dansent avec les crèmes, jus de fruits ou les fraises. Si chacun avait l'occasion de vivre de telles heures le monde serait plus beau. Les chanteurs transpirent à grosses gouttes, il n'est pourtant que 9 h. "Nous sommes là pour nous dépasser et vous faire plaisir".

Nous nous rendons à l'avant dernier jour du "Heritage Festival". Un groupe sud-africain Jimmy Dludlu of Capetown, avec sax soprane, nous offre un concert soigné. Quelques scènes trop bruyantes semblent nous pousser à abandonner les lieux. Heureusement, alors que l'on s'y attendait le moins, les Holmes Brothers se présentent sur la scène interview concert. Au-dessus de la scène est inscrit "The soul of music is the soul of the musicians". Cela ne pouvait mieux tomber puisque le programme des Holmes est : Blues, Gospel et Soul. Le trio est fort de 3 instrumentistes (Guitare, basse, batterie) et de 3 chanteurs, polyphonie ou Call & Respond. Ils ont déjà enregistrés de nombreux albums à New York, ou ils sont reconnus comme Blues and roots music. Ils se produisent dans de nombreux pays, et ce n'est qu'aujourd'hui que je les découvre. Après un interview délicat ils interprètent de petits bijoux, surtout l'un avec une étonnante voix de tête, ou voix des anges (celle du batteur). Le soir même, un splendide repas nous est offert par Steve et Polli, nos amis Neo Orléanais, au Muriel's, le restaurant sélect au coin de Jackson Square.

Dimanche 4/5
George French and the original Storyville Jazz band chez Economy Hall. 3 Noirs, 3 blancs. Jazz traditionnel présenté par le contrebassiste French, traditionnel mais enflammé. C'est bien à Storyville que tout a commençé. Roland Guérin; un jeune noir, aristocratique, commence son récital par un solo de contrebasse. Jazz un peu trop intellectuel, réhaussé par de beaux passages de son instrument. L'ensemble n'est pas sans charme.
La Martinique
L'entrée en force de la "French Caribbean" est impressionnante : Films, conférences, expositions, concerts...
L'Amérique a accordé l'espace, et la France a mis le paquet. Il est vrai qu'il faut bien trouver des destinations aux touristes américains qui piaffent. Le nombre de pays où ils sont bien accueillis se rétrécit si vite ! Un voyage y est organisé. C'est le cas, mais en plus discret pour le voyage à Cuba conduit par WWOZ .
Prof Arturo Pfister et the Jazzeotry ( contraction de jazz et de Poetry : Poesie). Spectacle original avec des mots forts plus que des musiques significatives. Mais on commence et on finit par des standards colorés : Duke Ellington et Carlos Jobim. Intéressant!
Wild Magnolias
photo de JC Billaud Un passage vers la plus grande scène pour voir ce show extraordinaire. Les participants de la tribu indienne sont emplumés somptueusement. A 200 mètres, on supporte la sono hyper. Des cuivres type "Rebirth Brass Band" emportent un enthousiasme général. Les spectateurs ne papotent presque plus, et même ceux qui dormaient se sont levés et s'extasient. Étonnante Amérique !
Buddy Guy
Buddy Guy et sa guitare noire à pois d'or. Pour nous voici la clôture du festival. Nous avons choisi des places assises, bien en arrière, pour nous protéger. Dés son entrée en scène, les 2000 spectateurs se sont levés, et le resteront. Tous fanatiques de blues et de Buddy, ils connaissent le répertoire et chantent avec lui. Il sait imposer la calme pour reprendre le fil du blues authentique. De loin en loin il donne des déferlantes pour plaire à son public. On a dit qu'il revenait aux sources et gagnait en authenticité, on peut l'apprécier. Surtout la voix, sa voix chaude, simple, avec les m m m . Lui aussi compose des phrases qui répondent aux sollicitations de la salle. Il est bien le ton du blues, avec les vibratos enfumés. Son organiste Hammond et le sax, à moindre degré ont été également ovationnés. Ce ne fut pas une standing Ovation , mais un concert comme s'il n'y avait pas de siéges. Nos trois voisins noirs émettaient des bruits de satisfaction, vraiment intraduisibles.

Lundi 5 mai
NO s'est levé ce matin avec un petit mal de tête. Le Times Picayune (le quotidien NO) nous apprend que les éleveurs d'huitres attaquent l'Etat de Louisiane pour avoir provoqué des pertes énormes à leurs parcs. L'hydrographie du delta du Mississippi (et non du delta blues) a été modifiée du fait des barrages construits. La salinité de l'eau a donc baissé, vers une eau quasi douce. Cette pollution entraîne des pertes de milliards de dollars (ou d'Euros). Gentiment le Picayunne parle d'une addition salée. Autre information : Le nouveau maire de la Nouvelle-Orléans, Ray Nagin, déclare "la guerre sainte" à la corruption municipale qui fleurit (c'est son mot) depuis 10 années. Ainsi la vie normale reprend, la musique se tait.
FIN


"Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu'il se suffit à lui-même. On croit qu'on va faire un voyage, mais bientôt c'est le voyage qui vous fait, ou vous défait"
Nicolas Bouvier.


Copyright © Jean Claude & Rauni Billaud 20/05/2003

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